Test Little Nightmares : cauchemars en cuisine
En développement depuis plusieurs années du côté de Tarsier Studios, Little Nightmare est toujours resté discret. Mais à chacune de ses présentations, son potentiel sautait aux yeux. Il nous tardait donc de prendre en main Six, la curieuse fillette au ciré jaune luttant pour sa survie.
La faim justifie les moyens ?
Little Nightmares explore un thème jusqu’à présent très discret dans le paysage vidéoludique : la faim. Rappelons d’ailleurs que le titre initial du jeu était Hunger. Lorsque Six se réveille au fond d’une cellule de l’Antre (une grande structure sous-marine étrange et lugubre) son seul objectif est d’en sortir le plus rapidement possible. Mais plusieurs difficultés se dressent face à elle. La première vient de sa taille : Six est minuscule, un peu comme si un personnage de maison de poupées vivait dans le monde réel. La seconde vient des habitants de l’Antre : ces monstres hideux ne pensent qu’à manger et aimeraient fortement mettre Six au menu ! Tout au long de l’histoire, la nourriture est omniprésente et chaque monstre mange ou prépare à manger. Vous vous en doutez, on est ici loin des appétissantes assiettes de Philippe Etchebest. On se demande toutefois au fil de notre progression si ces créatures ne sont pas, au final, une critique de notre surconsommation de nourriture et de la malbouffe répandue aux quatre coins de la planète. Alors que tout le monde mange, notre jeune héroïne a, elle, terriblement faim. Son ventre gargouille et elle se courbe de plus en plus. A plusieurs moments de l’aventure, il faudra donc lui trouver quelque chose à manger. Ce qui aurait pu être un bon mécanisme de gameplay est toutefois sous-exploité et ne sert au final qu’à ajouter un peu de noirceur à la narration.
Cette narration est d’ailleurs entièrement muette. Aucun personnage ne parle et l’histoire se découvre au fil de notre avancée dans les cinq niveaux qui composent l’aventure (à la manière d’Inside ou Unravel, deux titres à la structure proche). Le gros point fort de Little Nightmares est incontestablement son ambiance. Tout est malsain en permanence et on le ressent parfaitement. D’abord parce que la direction artistique est à la fois magnifique, sombre, glauque et poisseuse. Ensuite parce que la bande-son est une véritable pépite nous immergeant totalement dans cet univers ténébreux. En plus de ça l’Antre tangue. Il suffit de s’arrêter quelques secondes pour remarquer que la caméra n’est jamais stable et crée donc cette impression d’être dans un bateau en pleine tempête. Pour ne rien gâcher, l’aspect technique est aussi de haut niveau. Chapeau bas pour les éclairages gérés à la perfection et contribuant eux aussi à l’ambiance.
Rien ne sert de courir, il faut partir à point
Incarner Six est un plaisir mais aussi une source de stress. Little Nightmares ne fait pas spécialement parti de ces jeux où l’on sursaute sans cesse. Il impose plutôt un sentiment d’oppression très pesant. Dans le fond les cinq niveaux se déroule de la même façon mais ils se renouvellement brillamment, de sorte qu’il est bien difficile de lâcher la manette avant d’avoir terminé l’aventure. A l’instar d’autres jeux du genre, le joueur avance horizontalement à travers les décors. Ici toutefois, on peut également se déplacer sur la profondeur sur quelques mètres. Cette possibilité enrichie considérablement le gameplay. En effet dans chaque niveau vous devez échapper à un ou plusieurs habitants de l’Antre. Il faudra donc se cacher sous un meuble, grimper au sommet d’une bibliothèque, marcher le long d’une poutre ou courir derrière une table pour éviter de vous faire attraper. Et le choix d’avoir intégré de la profondeur aux décors permet donc de multiplier les chemins. D’autant qu’en faisant tomber certains objets, vous pouvez faire diversion avant de courir de toutes vos forces jusqu’à la prochaine porte. De légers soucis de collisions sont à noter mais rien ne venant vraiment entacher l’aventure.
Chaque apparition d’un habitant de l’Antre est source de stress. Sans trop spoiler l’aventure, sachez que quand un monstre a de très long bras ce n’est pas pour rien. Vous ne serez en sécurité quasiment nulle part ! La mise en scène est bonne et monte crescendo jusqu’à la fin du jeu. Celle-ci arrive après environ quatre heures, ce qui est correct pour un jeu vendu 20 euros. Le bémol vient plutôt de la façon dont la fin arrive. Sans vouloir faire un mauvais jeu de mot, on reste un peu sur notre faim. On aurait aimé un ou deux niveaux de plus pour clarifier davantage l’histoire.